• La première fois qu'on m'a parlé de pictogrammes, j'étais en stage  dans un centre de rééducation fonctionnelle pour enfants. La jeune orthophoniste qui m'accueillait sur une demi-journée en complément de ma maîtresse de stage officielle s'y intéressait fortement pour un jeune enfant polyhandicapé. Il était en fauteuil et avait une tablette qui y était accrochée. Cette jeune ortho était précurseur dans ce centre qui ne semblait pas très au fait des moyens augmentatifs. En quatrième année, j'ai de nouveau été en stage avec des enfants IMC ainsi qu'avec des enfants dysphasiques. Les pictogrammes étaient utilisés chez les premiers pour la communication même si ce n'était pas toujours au point. Quant aux seconds, ils bénéficiaient également de pictogrammes mais dans un autre but, celui rééducatif de l'enrichissement morpghosyntaxique. Et on arrive au but de mon article. Il ne faut absolument pas confondre ces deux approches et cela est vrai pour beaucoup d'outils. Quand on utilise un outil, pour l'utiliser correctement, il faut savoir dans quel but on l'utilise. Il faut ainsi faire la différence entre réadaptation et rééducation. Cette distinction peu réalisée en orthophonie est donc fondamentale et est bien connue des ergothérapeutes. C'est d'ailleurs grâce à mon ancienne collègue ergo dont je parle aussi ici et avec qui j'ai beaucoup appris que je me suis penchée là-dessus. Cécilia, si tu me lis...

     

    Revenons à nos moutons : les pictogrammes.

     

    • L'aspect réadaptatif : moyen augmentatif à la communication. Dans ce cas-là, ce qu'on veut, c'est que l'enfant utilise des pictogrammes dans sa vie quotidienne pour communiquer, pour s'exprimer. Il va pointer différents pictogrammes pour faire des demandes, donner des informations, etc... On présente alors les pictogrammes sous forme de classeur, de cahier et l'enfant cherche et pointe. C'est ce qu'utilisent beaucoup d'enfants avec paralysie cérébrale (le nouveau nom des enfants avec IMC). Ils ont leur outil sur le fauteuil et peuvent ainsi exprimer leur principaux besoins et commencer à raconter. C'est aussi cet aspect qu'on utilise quand on veut que les enfants comprennent mieux certaines choses qu'on leur explique, quand on veut qu'ils en gardent une trace, quand on affiche des scénario sociaux par exemple ou des emplois du temps. On est dans la réadaptation, dans le moyen augmentatif.

     

    • L'aspect rééducatif : dans ce cas, les pictogrammes ont une utilité principale : l'encodage syntaxique (et je fais exprès de ne pas parler de morphosyntaxe). Ils vont aider l'enfant à visualiser les différents constituants de la phrase. L'enfant pourra construire des phrases en séance avec ses pictogrammes, les oraliser et au fur à mesure que l'enfant progresse dans l'acquisition des structures travaillées,  les pictogrammes vont disparaître. Ils sont donc très utiles dans le début de la progression morphosyntaxique pour produire des phrases de plus en plus longues mais dès que l'enfant commence à avoir accès à l'écrit, j'avoue, j'utilise l'écrit (et je mixe d'ailleurs aussi). Les pictogrammes utilisés dans ce sens sont aussi justement  un appui intéressant pour la lecture : c'est une approche de découpage en mots, de traces et de codage selon les conventions de l'écrit. Ils permettent aussi de complexifier des phrases un peu simples si on se contentait uniquement des conversions que l'enfant maîtrise. Je peux pictographier "mange" alors que l'enfant ne maitrise pas le graphème composé "mange" si je veux écrire Nina mange une pomme, ce qui ferait :

    Les pictogrammes, pour quoi faire ?

     

    Chez les enfants dysphasiques que j'ai croisés, j'ai utilisé les pictogrammes dans un but rééducatif essentiellement, voire uniquement.

     

    Voici un exemple réalisé avec la feuille PictoSélector que j'avais partagée pour travailler avec les animaux de tri :

     

    Les pictogrammes, pour quoi faire ?

     

    Lorsque j'ai voulu utiliser les pictogrammes dans un but augmentatif, cela n'a jamais marché. Au début, je me suis dit que c'était parce que j'étais nulle dans l'introduction des systèmes augmentatifs (oui, oui, je sais aussi me remettre en question et me dire que ce je fais n'est pas cohérent et pas bien amené). En fait, je me suis aperçue que les enfants chez qui je voulais les introduire arrivaient parfaitement à exprimer leurs besoins. Leurs problèmes d'intelligibilité s'observaient essentiellement dans des situations d'évocation, de récit sur leur vie dans la classe ou à la maison et que tout ce que je pouvais leur donner comme Picto n'était pas suffisant pour tout ce qu'ils avaient à raconter. Ce qu'ils avaient à dire n'était pas forcément dans leur cahier qu'ils ne transportait pas facilement. Le jour où l'un d'eux a parlé de cracotte (!) ça m'a fait vraiment tilt. Un niveau de vocabulaire passif d'un enfant de 4 ans alors qu'on a 6 ans signe la pathologie mais l'étendue lexicale d'un enfant de 4 ans est immense et difficilement consignée dans un classeur ou un cahier.

     

    Et vous, utilisez-vous les pictogrammes ? Faites-vous cette différence ?

     

    Pour utiliser les pictogrammes, vous trouverez des choses ici.

     

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  • A venir cette semaine :

    Les pictogrammes, pour quoi faire ?


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  • Exalang 11-15

    Ça fait longtemps que je voulais faire un article sur Exalang 11-15… Et puis, dernièrement, on en a reparlé avec une de mes collègues qui me dit "il est vraiment bien".

    EXALang 11-15

    Alors, pourquoi il est bien ?

    - Tout d'abord, je ne suis pas fan des tests (pas des bilans, voir article ;) sur ordinateur. Je trouve que lors d'un bilan initial, quand on ne connait pas l'enfant, c'est compliqué à présenter. On a du mal à se faire une idée de fonctionnement de l'enfant, de sa relation à l'autre, de comment on va accrocher. Cet avis n'engage que moi, bien sûr et il est probable, que dans certains cas, cela soit la seule manière de faire passer des tests à un enfant (cela ne m'est pas encore arrivé). Mais cette réserve tombe lorsqu'on parle des adolescents ou des grands enfants (je n'aime pas spécialement le terme pré-adolescent qui ne correspond pas à grand-chose et pourtant, j'en ai deux à la maison de ces grands enfants, pas encore des ado). Lors d'un bilan initial avec un jeune qui n'a peut-être pas envie du tout de montrer ses difficultés, le média ordinateur peut être un atout. De même, pour les bilans d'évolution, chez des jeunes qui ont de la rééducation depuis des années (c'est le cas de la plupart de mes patients, sourds ou dysphasiques), cela change le rapport au bilan dont ils ont l'habitude.

    - Ensuite, d'un point de vue des épreuves, je le trouve vraiment bien. On commence dans la littérature à s'intéresser aux ado, à leurs difficultés : un récent article très clinique dans Glossa (ici) et aussi tous les articles sur les mauvais compreneurs (notamment ). Quand le jeune vient avec cette plainte (ne comprend pas en classe) ou encore qu'on trouve ce genre de difficulté lors du bilan (cf article de Glossa), alors Exalang 11-15 propose tout un tas de petites épreuves vraiment intéressantes pour mieux comprendre comment il appréhende la sémantique. Outre les classiques épreuves de compétences associées (et non des pré-requis, comme les empans) ou de langage (phonologie, compréhension morphosyntaxique), on trouve des épreuves sur les inférences, les compétences sémantiques (utilisation du contexte, polysémie), compétences fondamentales pour avoir un lexique suffisant et de qualité quand on grandit. Ces épreuves nous aident donc à mieux cerner pourquoi le jeune a des difficultés (voire des troubles) de la compréhension et surtout, comment on va pouvoir l'aider.

     

    Ce qui est moins bien (bah ouais, on ne peut pas être parfait) : la même critique que pour les autres Exalang : l'ordinateur, c'est chouette parce que ça calcule tout, tout seul mais ça a le défaut de cette qualité : comme le temps est pris en compte, et qu'il faut cliquer en même temps, on a deux choix. Faire cliquer à l'ado, au risque qu'il clique trop vite et qu'un item passe à la trappe ou cliquer nous, mais dans ce cas, on a bien du mal à noter les réponses, alors que pour moi, le type de réponse est fondamentale et on ne perd pas le risque, nous aussi, de cliquer trop vite.

     

    Malgré cela, je vous conseille cet outil et toutes les copines ou collègues avec qui j'en ai parlé en sont ravies ! Et vous l'utilisez-vous ? Qu'en pensez-vous ? Sinon, vous utilisez quoi ?

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  • A venir cette semaine :

    Critique d'Exalang 11-15

    Origine du dessin : danger école

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  • Lors de ma présentation de Bichat, on m'a demandé un exemple d'atelier d'écriture. En voici un que j'ai fait directement en rentrant de Bichat. Avec cet atelier, je voulais que Boucle d'Or (dont je vous ai déjà beaucoup parlé) retienne les quelques mots qu'elle ne connaissait pas et qu'on avait explicités.

    Voilà la consigne : Un cannibale qui vient d'Australie arrive dans un magasin qui fait son inventaire. Il s'exclame "Ce n'est pas humain !" Pourquoi ?

    Et voilà ce que Boucle d'Or a écrit :

    Chin-Kong arrive en France à Marseille, il vient d'Australie et c'est un cannibale. Il se promène dans une ville puis il voit un magasin de vêtements qui est en train de faire son inventaire. Et il s'exclame : "Ce n'est pas humain !". Puis d'un coup les vendeurs voient le cannibale, qui est entré sans autorisation et demandent : " Quoi quoi qu'est ce qui n'est pas humain ?" Chin-Kong répond : "C'est trop cher , alors que ça ne sert à rien !" En effet, le cannibale a juste un pagne.

    Et moi :

    Kalypto débarque d'Australie . Il se promène dans notre belle ville de Paris sur les Champs-Elysées. Kalypto a faim mais il ne se nourrit pas de hamburgers, non il aime manger les doigts, les doigts de ses congénères. C'est un cannibale. Il arrive devant un fast-food qui sent bon la viande mais le fast-food est fermé pour inventaire. Alors il se faufile par la porte de derrière et il voit les employés s'activer pour compter le stock. L'un d'eux sort, il a la mine dégoûtée, il vient de trouver un rat. Il l'assomme d'un coup de chaussure et le balance dans une poubelle. Kalypto s'exclame : "Ce n'est pas humain !" Il décide de retourner dans son pays natal où on ne massacre pas les rats.

    Il y a quelques années, dans mon ancien travail, deux années de suite, j'avais animé avec des collègues des ateliers d'écriture avec deux collègues. On s'était inspiré de ce livre là. Cela peut donner des idées.

    Et vous ? En utilisez-vous ? Avez-vous suivi les ateliers de Gaëlle Pingault ?

    Les articles qui parlent de Boucle d'or : quelle mouche ?, carte mentale, cultimots junior

    Ajout le 7/02/15 : sur le même thème, des mini-livres A4.

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